Figurants

Une histoire qui semble ne jamais finir

Septembre 2002
Certaines personnes à Rome gagnent leur vie en se faisant passer pour des « soldats romains » autour du Colisée, demandant de l’argent aux touristes s’ils veulent être pris en photo avec eux.
Il y a de nombreuses années, j’ai commencé à remarquer ces types déguisés en soldats romains, faisant du bruit pour attirer l’attention des touristes.

Au début, il y en avait quelques-uns, l’année suivante quatre ou cinq, maintenant il y a une légion (y compris des femmes se faisant passer pour des « matrones » et des gars plus âgés en toge comme sénateurs) et il y a aussi eu des cas de combats territoriaux. En fait, l’un des centurions a été récemment arrêté parce que son épée en métal (un accessoire) était considérée comme une arme interdite.
Pour le service, ils facturent de l’argent, mais cela dépend beaucoup de l’origine des touristes. On en demande parfois plus aux Japonais et aux Américains, à cause de leur capacité de dépense et aussi parce qu’ils sont gênés de discuter trop longtemps des prix.


Une fois, j’en ai repéré quelques-uns au bar de la station de métro, ce qui était vraiment un spectacle étrange. Je veux dire, un soldat romain buvant un cappuccino et fumant sa cigarette ! Malheureusement, je n’avais pas mon appareil photo avec moi…
Il semble que 40 de ces personnes aient formé une association, qui comprend des centurions, des gladiateurs et même des empereurs (comprenant probablement aussi des épouses), demandant une reconnaissance officielle et, à terme, un emploi stable.
La nouvelle est que la municipalité de Rome, à partir de la fin de l’année, veut publier une licence officielle avec un titre qui en italien sonne comme « figurante », qui est le nom que dans Cinecittà est accordé aux figurants du film. Les aspirants gladiateurs devront passer un examen qui inclut une certaine connaissance de l’anglais (j’inclurais aussi le latin, mais j’avoue que ce serait trop) et ils devront facturer un prix fixe pour l’image.
N’est-ce pas un progrès ?

J’ai rapporté ces nouvelles en 2002. Maintenant, j’écris en 2023 mais, comme vous pouvez le voir dans les nouvelles rapportées ci-dessous, ce problème est toujours un problème après 21 ans. C’est tellement triste que rien ne change dans cette ville….

Rome, mars 2003
Une émeute a éclaté parmi les gladiateurs posant pour les touristes ; environ cinq d’entre eux ont été appréhendés parce qu’une bagarre a commencé, peut-être pour des raisons territoriales. Désormais, les « figuranti » sont censés avoir une licence accordée par la municipalité, leur tenue vestimentaire doit être certifiée et ils doivent facturer 5 euros pour poser. Les gladiateurs n’ont pas révélé les motifs de leur combat : certains d’entre eux, interrogés, ont déclaré qu’ils étaient tous en bons termes. Les figuranti arrivent le matin, se changent dans une voiture ou dans les toilettes de la station de métro, et restent sur place toute la journée.

Avril 2012
« Travaillons au Colisée, donnons-nous certaines règles, restons ici ». La protestation des centurions qui ont occupé le Colisée en escaladant le deuxième anneau du monument explose à nouveau à Rome. Les figurants avaient déjà occupé l’amphithéâtre Flavien avant Pâques : ils protestent contre la décision de les retirer des zones archéologiques. En ce moment ce sont deux centurions qui ont escaladé le Colisée, toujours dans le deuxième anneau, mais à quelques mètres de la place occupée samedi dernier. Sur la place il y a tous leurs collègues qui critiquent le travail de la Surintendance d’Etat. « Les choses s’étaient bien passées lors de la réunion avec les autorités locales mardi – dit Davide Moscato, l’un des représentants des figurants -, mais hier, ceux de la Surintendance ne se sont même pas présentés à la réunion. La question, cependant, est que la prétendue réglementation qui nous oblige à rester à l’écart du Colisée ne nous convient vraiment pas. Ils doivent nous permettre d’exercer à côté de ces monuments où la figure du centurion a du sens. Nous ne pouvons pas aller sur le Colombo ou le Tuscolana »

25 SEPTEMBRE 2015
 Rome, au Colisée, les « gladiateurs » insultent lourdement un journaliste roumain. Centurions grossiers, calomnieux et menaçants. Certains « centurions », ces figurants qui se font payer devant le Colisée pour prendre des photos avec les touristes, sont mis en cause pour un reportage de la chaîne de télévision roumaine Kanal D qui les dépeint comme des bagarreurs et des escrocs.
Sur les images, on voit un journaliste aux prises avec des gladiateurs qui demandent d’abord 30 euros pour une photo puis, après que le journaliste a sorti un portefeuille plein de billets, ils en demandent 100. De lourdes insultes fusent lorsque le journaliste refuse : « Roumains de m…. », « tête de c… » et aussi un « je vais te battre » sifflé après avoir montré ses parties intimes comme un geste de défi. Le tout capté par les caméras de Kanal D.

8 SEPTEMBRE 2017
Le maire Raggi a raison d’interdire les centurions du Colisée : l’appel est rejeté. Le Conseil d’État a rejeté aujourd’hui le recours présenté par un petit groupe de centurions. Le tribunal administratif du Latium avait déjà rejeté le recours contre l’ordonnance anti-centurion du maire de Rome. 

4 avril 2019Interdiction des extras au Colisée
La disposition, qui sera valable jusqu’au 30 juin 2019, « concerne l’ensemble du territoire du centre historique inclus dans le périmètre reconnu comme site de l’Unesco. L’objectif est de protéger le patrimoine artistique, historique, monumental et de garantir la convivialité et l’habitabilité de patrimoine culturel par les touristes et les citoyens, en garantissant le décorum et la sécurité ». Les figurants déguisés en anciens romains pour une photo, parfois imposés aux touristes, demandent entre 20 et 50 euros. Parfois, ils ont même été responsables d’attaques contre ceux qui ne répondaient pas adéquatement à leurs demandes économiques. Le 31 mars, l’arrêté signé par le maire début janvier a expiré, un document conçu comme provisoire, en attendant l’entrée en vigueur du nouveau règlement de la police urbaine qui interdit l’existence de figures telles que les « gladiateurs » à temps indéterminé.
Ou définitivement. Mais la disposition signée par le maire ne satisfait pas du tout Assotutela : « La signature de l’ordonnance syndicale renouvelant l’interdiction de toute activité similaire aux centurions – précise Michel Emi Maritato, président de l’association de consommateurs -. La disposition communale sera valable jusqu’au 30 juin 2019 et concerne l’ensemble du territoire faisant partie du site Unesco. Première question : pourquoi la prolongation n’est-elle que de trois mois ? Deuxième et troisième question : pourquoi ne concerne-t-il que le centre historique ?». L’association craint que cela ne pousse les centurions vers des sites moins centraux mais tout aussi attractifs, comme les monuments de la voie Appienne. « Est-ce à dire que les monuments archéologiques de la banlieue, aussi splendides qu’importants, sont de second ordre pour le Capitole et pour le maire Raggi ? ».

14 septembre 2022 D’abord la photo, puis l’attentat : un centurion arrêté au Colisée
Menaces et agressions physiques contre deux touristes. Pour le « centurion », arrêté, l’ordre d’expulsion a été émis qui aura une durée de 3 ans Les « gladiateurs » sont l’une des principales attractions de Rome, à proximité du Colisée et à proximité des principaux lieux d’intérêt de la capitale. Mais parfois, ils sont aussi les protagonistes de reportages, comme cela est arrivé à un centurion de 43 ans arrêté lors d’un des services de contrôle des abus anti-illégaux. Comme le rapporte le journal La Repubblica, l’homme a exigé 40 euros à deux touristes qui avaient pris deux photos. Le centurion a été identifié grâce au signalement de certaines personnes présentes et interpellées dans la zone du Colisée par les policiers du commissariat de Celio.
Le tribunal a validé l’arrestation mardi matin : l’accusation est d’extorsion. Selon ce qui a été reconstitué par la police, le « centurion », après s’être fait immortaliser aux côtés du couple de touristes vénézuéliens, a réclamé 40 euros.
« Il exigeait vingt euros pour chaque photo prise », le témoignage du couple. Les deux visiteurs ont refusé de débourser l’argent demandé mais, après une série de menaces et d’insultes, dont quelques secousses, ils ont décidé de remettre l’argent au centurion. Heureusement, l’intervention des agents a été providentielle. Pour le « centurion », l’ordre d’expulsion a été émis qui durera 3 ans, étant un résident en dehors de la ville de Rome.

08/05/2019 Un Italien de 26 ans arrêté.
C’est arrivé hier soir au Colisée lorsque des étudiants suisses, en vacances dans la capitale, ont approché les soi-disant « centurions romains », leur demandant de prendre une photo souvenir. Lorsque l’un des garçons a sorti son portefeuille pour payer les 5 euros demandés, l’un des « centurions » a habilement glissé le contenu de son portefeuille : 80 euros en billets de 50, 20 et 10 euros, puis placé à l’intérieur d’un sac rouge caché sous son manteau. Lorsque les agents de la Police d’Etat du commissariat de « San Lorenzo » et de « Porta Pia » sont arrivés sur place pour un contrôle, le « soldat romain », qui les avait vus arriver, s’est empressé de rendre un billet de 20 euros à la victime, précisant que les 60 euros restants avaient été remis par l’étudiant à deux autres personnalités parties entre-temps. Le voleur a refusé d’être fouillé et a commencé à crier après les agents. Accompagnés aux bureaux du commissariat de San Paolo, lors de la perquisition, les policiers ont trouvé, dans le sac caché sous le manteau, deux billets de banque, l’un de 50 et l’autre de 10 euros. Un témoin a également confirmé avoir vu le « centurion » prendre l’argent du portefeuille du garçon. Au terme des investigations, S.G., un Romain de 26 ans, a été arrêté pour avoir résisté à un agent public et dénoncé en état de liberté pour vol aggravé.

8 décembre 2022
Menaces et extorsions, mais aussi activités illégales et passages à tabac à l’ombre du Colisée.
Après l’arrestation de 3 centurions qui a eu lieu la semaine dernière, désormais deux « coupe-file », avec un passé de « gladiateurs » et avec divers casiers judiciaires, se sont retrouvés menottés. Ils ont approché les guides touristiques du parc archéologique et les ont menacés : s’ils voulaient continuer à travailler et à vivre, ils devaient payer un pourcentage pour chaque personne qui visitait l’amphithéâtre le plus célèbre du monde.
Cette illégalité persiste au pied du monument ; presque tous les conseils municipaux ont dû s’en occuper et cela n’a jamais vraiment été résolu, entre ordonnances, interdictions non respectées et recours au Tribunal Administratif. A tel point que l’un des suspects, déchirant le relevé d’amende, s’est vanté de n’avoir jamais rien payé, malgré les crimes qu’il avait commis.

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